Estefania Penafiel Loaiza – Le Crédac
Slash Paris, le 5 mai 2014 — Par Guillaume Benoit
Chez Estefanía Peñafiel Loaiza, tout est question d’abandon, de disparition autant que de trace, d’un amoncellement des marques secrètes pour tisser le fil narratif d’une histoire qui s’efface. En investissant le Crédac, qui occupe l’ancienne manufacture des Œillets, l’artiste a souhaité mettre en lumière le passé de ce bâtiment ouvrier tout en imaginant la possibilité d’une persistance de sa présence, de son présent. À rebours, l’artiste fait émerger les formes lorsque celles-ci s’en sont allées. Non pas du vide, mais de l’oubli, d’un trop-plein d’images qui en auraient chassé les souvenirs.
Noir à l’écran ; dans sa première et très belle vidéo Fragments liminaires (la manufacture), Estefanía Peñafiel Loaiza sort de l’encre noire des photographies de la manufacture ; les zones lumineuses semblent percer jusqu’à former des images à la manière de la révélation des contrastes sur papier argentique pour disparaître ensuite de l’écran et laisser l’obscurité reprendre ses droits. Projeté immédiatement au cœur d’un processus « en cours », le spectateur pénètre l’exposition comme il entre dans un récit dont il ne saura jamais la fin. Car c’est précisément cette limite, cette complétude qu’Estefanía Peñafiel Loaiza repousse et rejoue pour mieux la conjurer, conquérant à nouveau la « durée » pour en faire une dimension nouvelle. Le temps n’est pas ici celui, mécanique, de la fonctionnalité et de l’efficacité, mais le temps plastique, éthéré du souvenir et de l’imaginaire, qu’elle met au service de l’histoire du lieu. Ainsi, une machine, imposante et grave, trône au milieu de la pièce. Œuvre de patrimoine, son intégrité est préservée et échappe à la destruction ou tout du moins à la disparition.
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